Mes amis ont le droit, eux!

 

Léa, 12 ans, s’apprête à commencer le secondaire. L’école n’étant pas encore commencée, elle profite des derniers jours des vacances en passant beaucoup de temps avec ses amies. Elles sont fébriles à l’idée de fréquenter bientôt l’école secondaire, signe ultime qu’elles entrent dans l’adolescence. Ses parents sont heureux de la voir enthousiaste, car au début de l’été, elle se montrait plutôt inquiète. Mais voilà qu’en cet été qui précède son passage au secondaire, Léa réclame de plus en plus de liberté, et commence à remarquer que les parents de ses amies n’imposent pas nécessairement les mêmes exigences et les mêmes limites que ses parents. Aussi, elle utilise souvent cet argument lorsqu’elle se voit refuser une permission : « vous êtes poches, mes amis ont le droit, eux »! Lorsqu’elle leur lance cette phrase, ses parents restent bouche bée et ne savent plus comment réagir. Ils se demandent s’ils devraient réviser leurs limites, ou s’ils ne devraient pas plutôt dire à Léa que cet argument ne tient pas la route et qu’elle devra respecter leur cadre, peu importe ce que les autres parents en pensent.

Même si nous voulons projeter une image de confiance en soi devant nos enfants, cet argument — mes amis ont le droit, eux — vient souvent semer un doute dans l’esprit de plusieurs parents… « Et si nous étions trop sévères, et si les autres parents avaient raison »? En fait, à la préadolescence ou au début de l’adolescence, il est normal que les enfants commencent à remarquer les différences entre les attentes et les limites des parents des autres et celles de leurs propres parents. Parfois, ça leur sert de prétexte pour critiquer les limites et argumenter, afin d’obtenir plus de privilèges ou de liberté.

Mais comment réagir lorsque notre ado se met à nous comparer aux parents de ses amis? D’abord et avant tout, il faut éviter une autorité écrasante, par exemple en disant : « je me fous des autres parents, c’est moi qui décide des limites que tu dois respecter ». Il est préférable de désarmer votre ado en lui disant que vous réalisez qu’il commence à remarquer les différences entre les fonctionnements de différentes familles. Il est également important de valider son émotion en lui disant qu’il est normal qu’il ressente parfois de l’injustice. En voyant que vous êtes à son écoute, il y des chances qu’il se calme et qu’il cessera de se braquer contre vous.

Ensuite, pour l’aider à comprendre votre position, demandez-lui de vous parler d’une situation où il aurait vu un de ses amis ou un camarade de classe faire un comportement que lui ne ferait jamais (par exemple, envoyer promener son professeur). Faites ensuite le parallèle avec votre situation : il y a des décisions que certains parents prennent, que vous, vous ne prendriez jamais. Puis, expliquez vos motivations qui se cachent derrière les limites que vous lui imposez (ex. : sécurité de l’enfant, évitement des risques que vous anticipez).

Même si vous ne pouvez satisfaire la demande de privilège ou de liberté de votre enfant, tentez de reconnaître le besoin qui se cache derrière sa demande et tentez de trouver une autre façon de satisfaire totalement ou au moins partiellement ce besoin. Tentez d’être logique, rationnel, de montrer que vous êtes à l’écoute et que vous tenterez un compromis (une situation gagnant-gagnant).

Enfin, dites à votre enfant que vous êtes content d’avoir eu cette discussion avec lui et que cela vous permet de mieux comprendre ses besoins. Faites-lui comprendre que les changements qu’il vit vous demandent une adaptation à vous aussi. Avisez-le que lorsqu’il vous fera la demande d’une nouvelle permission, vous pourriez avoir besoin d’un certain temps pour réfléchir ou discuter entre parents avant de donner votre verdict. Et soyez ouvert à vous remettre réellement en question parfois… surtout si vous savez que vous avez tendance à être mère-poule ou père-poule!

Si, malgré votre écoute, votre bonne foi et votre désir de tenter un compromis, vous ne pouvez satisfaire la demande de votre enfant parce qu’elle est complètement irraisonnable, assumez votre décision malgré sa frustration. Dites-vous que votre rôle de parent, c’est aussi d’être parfois rabat-joie… pourvu que ce soit pour le bien de votre enfant et non dans le but de gagner une lutte de pouvoir!

 

PS: Pour en savoir plus, vous pouvez consulter mon livre Les ados… Guide de survie pour parents!publié aux Éditions La Presse.

 

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