Quand un enfant semble indifférent aux punitions
Justin, 2 ans, commence à se montrer parfois agressif envers les amis de la garderie. L’éducatrice dit aux parents qu’il serait temps d’établir une certaine discipline à la maison en ce qui concerne le manque de respect et les comportements violents. Elle leur recommande également d’utiliser le « retrait » dans un coin ou dans la chambre lorsque Justin fait mal à son petit frère. Dès la première occasion, la mère tente d’appliquer ces bons conseils. Mais, contrairement à ce qu’elle pouvait anticiper, son fils ne pleure pas et semble indifférent lorsqu’elle le met dans un coin pour deux minutes. Elle croit donc que la technique est inefficace. Pourtant, le père lui fait remarquer qu’après être allé en retrait, Justin fait beaucoup plus attention à son comportement. La mère avoue qu’il a raison, mais elle se demande tout de même si elle ne devrait pas se montrer encore plus sévère.
Nous tenons probablement de nos parents ou de nos grands-parents l’idée qu’une punition doit faire réfléchir ou même faire un peu pleurer, pour donner une bonne leçon. Ainsi, lorsque l’on met un tout-petit en retrait et qu’il ne réagit pas en pleurant, certains parents ou intervenants demeurent perplexes et se mettent à parler d’enfant « téflon », insensible aux conséquences.
Il existe bel et bien une théorie sur les enfants dits « téflon »… certains enfants peuvent réellement se montrer défiant et manifester une espèce d’insensibilité aux interventions moins fermes. On parle alors d’enfants qui souffrent possiblement d’un trouble oppositionnel avec provocation. Il s’agit d’une attitude de défiance que ces enfants manifestent quotidiennement, face à toutes les formes d’autorités autour d’eux (école, garderie, maison, camp de jour…). Ce sont des jeunes qui perdent facilement le contrôle de leur colère, qui s’obstinent et argumentent avec les adultes, qui défient les consignes et les règlements, qui ennuient ou agacent délibérément leurs pairs, qui blâment les autres pour leurs erreurs et qui sont irritables et rancuniers.
Mais il ne faut pas sauter trop rapidement à ce genre de conclusion, simplement parce que Fiston ne pleure pas lorsqu’il est mis en retrait ou lorsqu’on lui impose une conséquence! En fait, une telle attitude pourrait signifier que l’enfant n’est pas trop émotif, ou encore que la conséquence le prend tellement par surprise qu’il ne sait pas trop comment réagir. Cela pourrait aussi être un signe qu’il est sécure et qu’il sait que son parent l’aime, malgré la conséquence. Le fait que l’enfant ne pleure pas peut également permettre de croire que l’intervention est à juste dose, pas trop abusive ou traumatisante, et que le parent l’utilise de façon rationnelle plutôt qu’émotive (ex. : sans crier ou démontrer trop de colère).
De toute façon, le but d’un retrait n’est pas de faire pleurer l’enfant. Au contraire! S’il est en crise de larmes ou de colère, le but du retrait est de le mettre dans une condition qui favorisera son retour au calme… pas de le faire crier plus intensément! Le retrait permet aussi de ne pas donner d’attention à un mauvais comportement et de faire un arrêt d’agir si l’enfant se montre agressif. Donner une conséquence devrait également avoir pour but de le responsabiliser en lui demandant de « réparer » ce qu’il a fait de répréhensible… L’époque où punir un jeune signifiait de lui faire mal ou de le faire pleurer est révolue… ou du moins, elle devrait l’être!
Si, après un retrait ou une conséquence, l’enfant est capable de reconnaître son erreur, d’apprendre le comportement alternatif qu’il devrait adopter en remplacement de celui qui était inadéquat et qu’il y a ensuite une période de temps significative avant que ce dernier ne se manifeste à nouveau, il est alors probable que l’intervention ait eu l’effet escompté, même si elle n’a pas provoqué de larmes.
Alors, si vous donnez une conséquence à votre enfant et qu’il ne pleure pas, cherchez à savoir ce qu’il a retenu de votre intervention, avant de conclure qu’il est « téflon ». Qui sait, peut-être est-il simplement orgueilleux et qu’il tente en fait de cacher une grande sensibilité… dans ce cas, devenir plus sévère ou le traiter d’insensible serait la pire chose à faire.
PS: Pour en savoir plus sur la discipline positive, vous pouvez consulter mon livre Ah non! Pas une crise…, publié aux Éditions La Presse.