Le perfectionnisme, c’est sain ou malsain?

 

Marie-France, 38 ans, a toujours été soucieuse de bien faire les choses. Christian, son conjoint qui l’adore, s’inquiète du fait que cette attitude perfectionniste nuise parfois à son fonctionnement. Son souci de bien faire les choses se transforme parfois en obsession : elle est très exigeante envers elle-même, elle met un temps fou à exécuter la moindre petite tâche, car elle ne peut tolérer de faire des erreurs et elle n’a presque plus de temps pour s’accorder des moments de plaisirs. Cette attitude a des répercussions sur sa carrière, sa vie de couple et même sur son fils Simon-Olivier, 7 ans. En effet, ce dernier réagit très fortement lorsqu’il ne réussit pas quelque chose du premier coup. Il se décourage facilement et dit parfois qu’il n’est « pas bon ». Lors de la dernière réunion de parents, son enseignante a dit qu’il manquait de confiance en lui. Elle a même parlé d’anxiété de performance. C’est à ce moment que Marie-France s’est reconnue dans cette forme d’anxiété. C’est à ce moment qu’elle a réalisé qu’il ne s’agissait plus d’un simple souci de bien faire les choses, mais plutôt d’un perfectionnisme à outrance qui la rend malheureuse, et qui influence même son fils qu’elle aime tant. Elle réalise qu’elle a peut-être besoin d’aide.

Je suis certaine que plusieurs d’entre vous ont déjà répondu « je suis perfectionniste » lorsqu’en entrevue pour un nouvel emploi, un des membres du comité de sélection vous a demandé « quel est votre pire défaut? »! Voilà un signe que ce « défaut » est extrêmement valorisé dans notre société! En fait, il faut comprendre qu’il y a un perfectionnisme sain et un autre malsain (ou même pathologique).

Une personne qui manifeste un perfectionnisme sain est assez exigeante envers elle-même, mais elle est capable d’ajuster ce niveau d’exigence selon l’importance d’une tâche. Elle a des attentes réalistes et des objectifs accessibles, et elle se permettra de faire des erreurs dans plusieurs contextes de sa vie. Le perfectionnisme lui apportera une satisfaction personnelle lors d’une bonne performance, ce qui augmentera son estime de soi. Surtout, elle n’a pas peur d’être jugée négativement par les autres lorsqu’elle fait une erreur, parce que dans sa perception, sa valeur personnelle ne dépend pas de sa performance aux yeux des autres. Performer est donc une source de valorisation, et non une façon angoissante d’éviter le jugement des autres.

À l’opposé, une personne qui souffre d’un perfectionnisme malsain ne se permet aucune erreur. La perfection est importante, même pour les tâches les plus insignifiantes… faire sa liste d’épicerie correctement devient donc aussi important que de s’appliquer à faire sa déclaration de revenus. Elle établit des exigences de réussite trop élevées et inaccessibles, ce qui amène parfois un sentiment d’échec, suivi d’une perte d’estime de soi et de sentiments dépressifs. Les efforts ne sont pas tant motivés par un désir de succès (la carotte) que par la peur de l’échec (le bâton). Souvent, plaire aux autres est plus important que sa propre satisfaction personnelle.

Selon l’individu, ce perfectionnisme malsain peut mener à plusieurs problèmes psychologiques, entre autres : l’anxiété, les troubles alimentaires (dans le cas d’un perfectionnisme de l’apparence du corps), la dépression, et même le suicide…

De plus, comme nous l’avons vu dans le cas de Marie-France et de son fils Simon-Olivier, le style de discipline, le modèle que représente un parent perfectionniste, ses exigences élevées envers son enfant peuvent amener ce dernier à devenir lui-même perfectionniste. Mais attention! Les parents ne sont pas les seuls coupables. D’autres facteurs peuvent favoriser le développement du perfectionnisme chez une personne : les médias, la fratrie, la pression d’être accepté par les pairs, le contexte économique et professionnel dans lequel la personne doit évoluer…

…en passant, il existe des métiers et professions qui exigent un certain niveau de perfectionnisme qui sera alors jugé normal. L’aéronautique et la neurochirurgie, en sont des exemples pour lesquels je suis certaine que vous serez d’accord avec moi! L’important, pour les gens qui travaillent dans ces domaines, c’est qu’ils puissent réajuster leur niveau de minutie lorsqu’ils sont dans leur vie personnelle.

Heureusement, il existe des solutions au perfectionnisme malsain… Si Marie-France décidait de consulter pour son perfectionnisme, son thérapeute l’inviterait sûrement à remettre en question ses pensées et ses croyances. Il l’aiderait à développer de nouvelles façons d’interpréter le succès et l’erreur. Il pourrait également lui suggérer de faire une liste des coûts et des bénéfices de son attitude. Enfin, il pourrait même lui suggérer de volontairement faire de petites erreurs, afin de l’amener à développer graduellement une tolérance à l’imperfection.

À ceux qui ont le souci de bien faire les choses, ne vous en faites pas. Il y a moyen d’être satisfait du travail bien fait, sans tomber dans le piège du perfectionnisme à outrance. Mais attention! Dans une société de performance comme la nôtre, ce piège n’est jamais bien loin…

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